kékètt - histoires courtes

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4.07.2006

Les Vilains de la fleur de Roche

Furieux, Robert le cafard s'attaqua au malheureux mur de sa chambre de bonne. Il y donna moult et moult coups de pied, criant sa hargne et y crachant son venin, qui, mine de rien, réussit au moins à détacher une section de l'abominable papier peint fleuri, résidu glorieux de l'âge d'or.

Robert, il a pas toujours été comme ça, dans la merde. Issu d'une famille très honorable, il avait foulé le Monde de ses pas sûrs et décidés; du bout de ses antennes, il avait sondé tous les recoins connus et moins connus des yeux des néophytes et, au final, pouvait prétendre à une vie politique trépidante, entouré de belles gonzesses, les poches remplies d'argent à en dégouliner partout, ce qui ne manquerait pas de faire aussi le petit bonheur des peuples, qui pourraient lui offrir âme et sang...

Mais Robert n'avait pas prévu la découverte de la Fleur de Roche.
Fleur de Roche...

Elle donnait richesse et puissance à qui la trouverait. C'est ainsi que Robert, le cafard, du jour au lendemain, ne valait plus grand chose dans les cercles privilégiés où les hommes fument le cigare et les femmes ont la ménopause.

Il tomba dans la dépression. Il se faisait écraser stoïquement. Il croyait en Dieu; son bonheur était éternel. Il pensait que Dieu l'enculait, et qu'il avait beaucoup de chance. La vie n'était pas douce, mais là était sa force. Les grandes phrases comme ça, ça en jette toujours un peu. Surtout quand on n'en comprend pas tout à fait le sens.

On le retrouva un beau jour, assis au bord du Fleuve, priant un poisson de l'engloutir. Le poisson lui répondait inlassablement: "Ça va pas non???"

Mais il ne voulait rien entendre. Il pensait que les sucs digestifs de cette étrange créature pourraient le guérir de ses nombreuses maladies de peau et que, de nouveau chié au monde tel Nicodème dans les écrits bibliques, qu'il avait lu avec passion, il serait clair, net, sans pustules, et pourrait prétendre à la Vie Amoureuse.

La chance n'était pas de son côté, et, dans une grande déflagration, il vit le poisson et tous ses copains exploser en petits morceaux, pour ensuite flotter bêtement à la surface argentée de l'eau.

Il rentra chez lui penaud; quelques centimètres de papier-peint attendaient toujours leur sort, et il était décidé à régler cette affaire.